Prometteur défenseur central de Rennes, Christopher Wooh est l’un des plus grands espoirs du football camerounais. À 23 ans, il rêve de marcher sur les traces de Rigobert Song, défenseur central comme lui. Avec RFI, lors d’une rencontre initiée par la Ligue de football professionnelle, l’Indomptable s’est livré avec fraîcheur pour parler de son actualité à Rennes, de Samuel Eto’o et bien sûr des ambitions plus que jamais affirmées de la sélection camerounaise.

RFI : Votre club de Rennes reçoit Saint-Étienne ce samedi (16h TU). Est-ce que vous ressentez une certaine pression sur ce match après un début de saison compliqué et une 15e place au classement en Ligue 1 ?

Christopher Wooh : Oui, forcément, parce qu’on a besoin de points urgemment. Mais on travaille bien, je sens que le groupe a retrouvé un peu de sa forme et son envie, donc je pense que ça va bien le faire pour ce week-end. En tout cas, j’espère.

Vous avez changé d’entraîneur avec le remplacement de Julien Stéphan par Jorge Sampaoli. On parle beaucoup du caractère de l’Argentin. Quelle impression vous a-t-il fait depuis son arrivée ?

C’est un entraîneur qui a beaucoup d’envie, qui le retransmet dans les entraînements, dans les causeries, dans les matchs, donc forcément on a envie de mettre de l’intensité. Il est très positif, il a envie de bien jouer, de garder le ballon, donc c’est le jeu que tout le monde aimerait pratiquer. Avec lui, j’ai déjà fait un retour vidéo juste après le retour en sélection, on a parlé un peu de comment jouer sans ballon et avec ballon. Ça a été très enrichissant. J’essaye de m’appuyer sur ça pour continuer à progresser.

Vous êtes défenseur central, et vous citez souvent comme référence Clément Lenglet (international français prêté à l’Atlético Madrid par le FC Barcelone). En quoi vous ressemblez vous, ou en quoi devez-vous progresser pour arriver au niveau où il est ?

Déjà, on se ressemble par rapport à notre parcours parce qu’on a évolué dans le même club de Chantilly. Et ensuite, on a été formé à l’AS Nancy. Et ce que j’aime chez lui, c’est sa qualité technique. Je pense que j’ai à progresser là-dessus, sur ses contrôles et ses passes qui cassent les lignes. Il est très performant à ce niveau. Ensuite, j’admire sa carrière. Il a quand même joué au Barça, il a joué en équipe de France et maintenant, il est à l’Atlético. Donc c’est un exemple à suivre. À mon poste, j’admire également Rudiger du Real Madrid pour sa mentalité et sa volonté de toujours vouloir « manger » son adversaire. Mais aujourd’hui, pour moi, le meilleur défenseur actuel au monde, c’est William Saliba (Arsenal). Dans sa sérénité, dans sa concentration et surtout dans sa faculté à répéter les bons matchs.

Parlons de la sélection camerounaise, vous l’avez rejointe en 2022. Vous auriez pu aussi jouer pour l’équipe de France. Qu’est-ce qui vous a motivé à porter le maillot des Lions indomptables ?

Depuis tout petit, je voyais mes parents regarder tous les matchs du Cameroun et j’ai toujours eu une attention particulière quand le Cameroun jouait, et la France aussi. Mais c’est vrai que lors des matchs du Cameroun, j’avais toujours cette excitation de vouloir qu’ils gagnent. Et je me suis toujours dit, avec mon père, que si un jour j’avais le choix, j’allais choisir le Cameroun. Donc dès que l’occasion s’est présentée, surtout quand le président Samuel Eto’o s’est déplacé chez moi pour me solliciter, je n’ai pas hésité. J’ai directement dit oui et je ne le regrette pas.

Comment est-on quand on est face à Samuel Eto’o qui parle pour vous convaincre de rejoindre le Cameroun ?

C’est vrai que quand il m’a dit qu’il allait se déplacer à Lens, je n’y croyais pas trop, franchement. Jusqu’au jour où il est arrivé et que je l’ai rencontré. Cela m’a fait bizarre de le voir parce qu’en tant que Camerounais, c’est notre figure nationale. Et de le voir me parler, être face à moi, c’était impressionnant. D’habitude, je le vois à la télé, et d’un coup il est face à moi. Il a cette faculté de convaincre les joueurs, sa carrière parle pour lui, et il a de l’ambition aussi pour la sélection nationale.

À cette époque, il y avait aussi Rigobert Song comme sélectionneur. Avoir Eto’o comme président et Song comme entraîneur, cela devait être impressionnant…

Surtout que Rigobert Song a évolué à mon poste. C’était vraiment la figure nationale à ce poste-là, « le numéro 4 mondial » comme on dit au pays. C’est une grande figure. Il a ce trait de caractère qui fait que c’est un passionné. Il donne envie –comme notre coach actuel à Rennes – de vouloir se battre pour lui et je suis reconnaissant de ce qu’il a fait pour moi. Je signe tout de suite pour avoir la même carrière que lui, surtout ses sélections (137) en équipe du Cameroun et toutes les Coupes du monde qu’il a jouées (quatre : 1994, 1998, 2002 et 2010).

Le Cameroun a bouclé les éliminatoires de la CAN 2025 sans la moindre défaite (quatre victoires, deux matchs nuls). Ce n’était pas gagné avec la crise entre la Fédération et le ministère. Comment vous avez géré cette tension au sein de l’équipe pendant les matchs ?

Depuis que le nouveau coach (Marc Brys) est arrivé, il y a eu beaucoup de malentendus, je dirais. C’était compliqué, mais franchement, je tiens à féliciter toute l’équipe parce que malgré ça, on a bien travaillé, bien joué. On a surtout retrouvé une identité de jeu qui nous ressemble et franchement, je prends du plaisir à jouer en sélection du Cameroun. Je pense qu’on peut faire de grandes choses si on continue comme ça.

Pourtant, le Cameroun, considéré comme un géant d’Afrique, n’a plus atteint la demi-finale de la CAN depuis 2017. Comment vous expliquez ce déclassement ?

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Déjà, je pense qu’il y a eu l’émergence de beaucoup de nouvelles nations qui sont très performantes. Aujourd’hui, les grosses équipes comme le Sénégal, la Côte d’Ivoire, l’Algérie, le Maroc sont costaudes. Et il y a d’autres équipes qui sont moins mises sur le devant de la scène comme le Burkina Faso ou même les Comores qui font du bon travail. Toutes les équipes ont leur identité et il n’y vraiment plus de petites équipes comme on a pu le voir lors des dernières CAN. Après, c’est vrai qu’il y a eu beaucoup de changements au Cameroun, mais depuis les derniers éliminatoires de la CAN et le début des éliminatoires de la Coupe du monde 2026, on retrouve un beau football. Et je pense que le grand Cameroun va revenir sur le devant de la scène.

Le Cameroun gagne, mais est-ce que vous continuez à voir de la crainte dans les yeux de vos adversaires comme à une certaine époque ?

Oui, pour moi, on fait toujours peur de par notre histoire et de par les matchs historiques qu’on a faits. Même quand nous sommes menés, nos adversaires savent qu’ils ne sont pas à l’abri d’une remontée. Même à 0-2 ou 0-3, le Cameroun est toujours là pour se battre jusqu’à la fin du match. Il y a toujours cet historique du Cameroun qui fait qu’on impose un peu la crainte chez les adversaires.

La CAN, c’est dans un an. Comment vous la voyez ? Quelles équipes pourraient contrarier les ambitions du Cameroun ?

Comme je l’ai dit, depuis que le nouveau coach est arrivé, on a fait de très bonnes prestations. De bons résultats et un bon contenu aussi. On a su trouver une bonne identité, un très bon groupe qui vit très bien ensemble. Si on continue comme ça – on sait que le foot ça va vite, donc en un an tout peut changer – mais si on continue comme ça, je pense qu’on peut aller très très loin dans cette CAN. Il n’y aura pas de grands favoris, peut-être le Maroc qui est chez lui et la Côte d’Ivoire qui est tenante du titre.

By Ibrahim