Dans une décision audacieuse et inattendue, le Burkina Faso, le Mali et le Niger ont officiellement annoncé leur retrait de l’Organisation internationale de la Francophonie (OIF). Cette institution, fondée le 20 mars 1970 à Niamey sous le nom d’Agence de coopération culturelle et technique (ACCT), voit ainsi un de ses piliers de la coopération francophone s’effondrer. Ce trio sahélien, déjà exclu de l’organisation en raison de bouleversements constitutionnels, rompt avec un cadre qu’il considère de moins en moins pertinent. Ce départ s’inscrit dans la lignée de leur retrait, le 28 janvier 2024, de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), qu’ils jugent hostile à leurs intérêts. Que signifie ce double désengagement ? Est-ce une quête d’indépendance ou le début d’un isolement délicat ? Analysons ce contexte géopolitique complexe.
L’OIF : une mosaïque d’ambitions francophones
Avant d’examiner les implications de cette rupture, précisons la nature de l’OIF. Plus qu’un simple regroupement linguistique, cette organisation regroupe des nations où le français est présent, que ce soit comme langue officielle, héritage colonial ou vecteur culturel. Sa mission est d’encourager la coopération entre ses 88 membres actuels, comprenant 54 États et gouvernements, 7 observateurs et 27 associés, dans des domaines tels que l’éducation, la culture, la science et la technologie. L’OIF défend également la langue française à travers le monde, réunissant environ 300 millions de locuteurs. Pour des pays comme le Burkina Faso, le Mali et le Niger, elle représentait un accès à des opportunités internationales cruciales. Alors, pourquoi se détourner de cette plateforme ?
AES-OIF : Une rupture aux accents souverains
Ce retrait, loin d’être un caprice, s’inscrit dans un mouvement plus large. Ces trois nations, confrontées à des transitions politiques et à d’énormes défis sécuritaires, souhaitent prendre le contrôle de leur avenir. Leur départ de l’OIF, après celui de la CEDEAO, reflète un sentiment de méfiance envers des structures multilatérales perçues comme des instruments de pression extérieure. En se retirant, elles affirment leur souveraineté face à une communauté internationale jugée intrusive. Toutefois, cette quête d’indépendance comporte des risques, soulevant la question suivante : à quel prix ?
Des lendemains oscillant entre espoir et péril
Les conséquences de cette décision sont complexes et incertaines. Ce choix pourrait entraîner ces pays vers de nouvelles alliances, potentiellement avec des puissances moins axées sur les prescriptions internationales. Cela peut être vu comme une émancipation, redonnant la voix à des nations fatiguées d’être marginalisées sur la scène mondiale. Néanmoins, l’envers du décor est plus inquiétant. L’OIF, avec ses programmes éducatifs, culturels et scientifiques, offrait une plateforme essentielle. En s’en privant, ces États risquent de s’isoler diplomatiquement et de fragiliser les déjà précaires solidarités régionales. Quant à la stabilité du Sahel, frappé par une multitude de crises, le manque de soutien de l’OIF, qui œuvre pour la paix parmi les pays francophones, pourrait aggraver la situation sécuritaire.
Les populations au cœur de l’incertitude
Au-delà des cercles politiques, ce sont les citoyens du Burkina Faso, du Mali et du Niger qui pourraient en pâtir le plus. Dans des régions où l’insécurité prévaut et où l’économie est chancelante, ces changements géopolitiques pourraient fragiliser encore plus des sociétés à la recherche de repères. Les domaines de l’éducation, de la culture et des échanges, soutenus par l’OIF, risquent de s’effacer, laissant un vide difficile à combler. Pendant ce temps, la communauté internationale observe, incertaine des effets de ces choix audacieux, se demandant s’ils vont inaugurer une nouvelle ère ou plonger ces nations dans une marginalité nuisible.
Une fresque d’avenir à écrire
En définitive, le retrait du Burkina Faso, du Mali et du Niger de l’OIF n’est pas un simple événement administratif ; c’est un tournant stratégique aux répercussions qui dépasseront les frontières du Sahel. Cette décision exprime leur volonté de redéfinir leur place dans le concert des nations, tout en les mettant face à de nouveaux risques. La communauté internationale reste vigilante, scrutant l’avenir, consciente que le destin de ces pays et celui de toute une région se jouera dans ce pari audacieux. Seul le temps, en tant qu’arbitre, pourra nous donner la réponse quant à la réussite ou l’échec de ces choix.